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L’EXPOSE SCHEMATIQUE DES CLAUSES
(extrait de l’exposé littéraire des clauses)

Il s’agit d’un repérage topologique, dans une optique informative, des différents ensembles concevables à partir des clauses littéraires.

Chaque ensemble est défini par deux figures, la première, composée d’un ou de plusieurs carrés divisés en neuf parties égales par trois colonnes verticales et trois colonnes horizontales, est appelée  » schéma programme « , la seconde, appelée  » figure d’échelle  » est un rectangle posé sur sa base et divisé en quatre carrés égaux.

Le schéma programme rend compte de la composition de l’ensemble plastique envisagé en renseignant sur la nature et l’emplacement des formes.

Chaque carré du schéma programme (trait gras) figure une ouverture de la, ou des fenêtre(s). Les formes sont figurées par des pastilles de la couleur de la forme envisagée (1) qui, selon qu’elles se trouvent dans les colonnes verticales 1, 2 ou 3, indiquent une forme de nature 1, 2 ou 3. L’emplacement des pastilles dans les colonnes horizontales 1, 2 ou 3 indique la position de la forme par rapport au fond : dans la colonne horizontale 1, la forme est appliquée sur le fond du tableau, dans la colonne horizontale 2, elle se trouve, par rapport au fond, à une distance de celui-ci égale à l’épaisseur d’une forme, dans la colonne horizontale 3, à une distance du fond égale à l’épaisseur de deux formes.

La figure d’échelle indique par une pastille, dans la partie 1, 2, 3 ou 4, que l’ensemble est réalisé dans l’échelle 1, 2, 3 ou 4. L’échelle d’un ensemble est fonction des dimensions de la (ou des) ouverture(s) de la (ou des) fenêtre(s) derrière laquelle (ou lesquelles) les formes sont disposées.

Les dessins 1 et 2, indiquent le sens de la lecture des deux figures.

Jean-Pierre Maury -1969

Remarque : en 1970-71, lors de la mise en œuvre de la troisième programmation, dite « à la flèche blanche », est apparu l’élément intitulé « contreforme », constitué par le négatif de la forme. Dans les schémas de programmation, la nature de cet élément est rendue visible par le placement des lettres « c » et « f » sous la pastille de couleur correspondant à la forme.

(voir les 2 illustrations en couleur).

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L’EXPRESSION INFORMATIVE      

INTRODUCTION A LA METHODE – 1971

 Le langage de notre époque est de plus en plus informatif et de moins en moins expressif ; on entend comme type de phrase expressive, par exemple : « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles », mais « la marquise sortit à cinq heures » est une phrase strictement informative. Cette évolution se retrouve dans d’autres domaines, par exemple dans l’action politique ou planification et prospective tendent à remplacer le  » j’agis d’abord, je pense ensuite « . L’expression plastique suit selon moi la même évolution. A la dualité information-expression en correspond une autre : objectivité-subjectivité. L’objectivité n’étant au mieux que la conscience de la réalité objective de la subjectivité en est donc indissociable ; mon travail est d’en accroître l’importance dans le domaine plastique d’où la subjectivité est donc inexpugnable. Celle-ci se retrouve au niveau du choix premier, la décision de faire, et au niveau du choix des clauses (1). L’objectivité est au niveau de l’observance de la loi que composent les clauses. Cette loi est la programmation, elle est le pôle informatif de ma démarche, ce pour autant que je ne m’en écarte pas. Loin de donner un sens à mon œuvre, elle donne une œuvre à mon sens.

La programmation est une œuvre informative qui se disperse, éclate, sous forme d’ensembles plastiques fonctionnels à plus haut niveau expressif qui en fin de compte l’illustrent. Ce qui apparaît au premier regard ce sont les structures géométriques, mais une lecture moins hâtive laisse entrevoir que la finalité actuelle de mon travail est d’ordre méthodologique et non d’ordre esthétique : j’entends par-là que la méthode, et surtout la prise de conscience de son existence, parallèlement à la nécessité de réaliser les ensembles plastiques fonctionnels, prime sur le choix contingent de ce qui n’est qu’un moyen : la forme géométrique.

   Que la fin du travail ne soit pas d’ordre esthétique n’exclut nullement qu’une source du plaisir éventuel puisse l’être. En effet, la compréhension synthétique d’un de mes  » tableaux  » peut être intuitive, de pure adhésion esthétique, car ce que je propose à ce niveau c’est un ensemble plastique fonctionnel à vocation ornementale expressive, mais la compréhension analytique (2), le déchiffrage est une lecture plus ardue, à mes yeux privilégiée, car, par elle l’œuvre globale est dans son principe entrevue, reconnue même, ce par le biais d’une seule de ses illustrations.

Jean-Pierre Maury – 1971

 

(1)  Je considère comme clauses de programmation : les formes et les couleurs choisies, les formats adoptés, les matériaux employés et toutes les dispositions particulières quant à ces éléments et alors relation. Les clauses sont exposées littérairement et schématiquement dans chaque programme.

(2)  La mise en page fragmentée et simultanée des formes (derrière les diverses ouvertures des  » fenêtres ») incite intentionnellement à une lecture analytique : je tiens néanmoins à concevoir des codes très simples par souci de lisibilité

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PEINTURE SIMULÉE – 1976

Ce texte fait suite à celui intitulé  » L’expression informative – Introduction à la Méthode » qui fonctionnait dans le cadre du travail entrepris comme un  » comment  » Ce présent texte veut être le « pourquoi » de ce  » comment  » quand le piège se referme sur qui aurait imprudemment aimé un langage pour ce qu’il n’est pas.

Mettre en garde contre l’expression informative, celle des lois, des règles, des normes et des fiches, ce langage du  » on  » et d’une idée de l’objectivité substitué à la diversité des langages du  » je « , de la poésie, de l’utopie et du rêve, mettre en garde donc contre ce formidable discours de l’idéologie dominante, de l’oppression et de la répression, est le propos du travail que j’ai entrepris depuis 1968.

Une dénonciation directe, accompagnée de l’exposé symptomatologique du fait, aurait pu en être le moyen, mais ce n’aurait été qu’un discours de plus pour une cause dont je serais ainsi devenu le militant avéré. De ce rôle tout m’écartait, car je me méfie des vérités ; aussi à m’engager je préférerai témoigner.

J’optai donc pour une méthode  » dramatique  » de mise en scène du langage considéré reposant sur sa seule action reproduite sans commentaire ni jugement, la simulation remplaçant la description, l’énonciation l’analyse, tandis que l’ironie prenait la plus grande part.

Les illustrations plastiques qui résultèrent de cette entreprise furent à l’image du langage du système pris pour modèle : elles pouvaient séduire ! Pourtant ce n’était pas un hasard si elle ne pouvait s’épanouir que derrière des grilles. Le piège était tendu … en même temps l’alerte était donnée.

Le langage de la loi, de l’ordre et du rendement était désamorcé sur la scène du jeu ou un simulateur ambigu l’avait amené pour y être l’acteur de sa propre parodie ; de danger, ce langage n’en était plus que le signal : attention ! un langage peut toujours en cacher un autre …

Jean-Pierre Maury – 1976

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AIDE-MÈMOIRE INFORMEL – 1978

Divers points contenus dans le présent aide-mémoire feront l’objet ultérieurement d’un développement détaillé.

Le travail actuel est fondé sur l’utilisation du vocabulaire plastique personnel acquis au cours de 10 ans de pratique de la peinture. Il représente une importante mutation à l’intérieur de l’approche, de l’exercice et de la relation à la joie de peindre.

   En effet, après avoir mis en scène, pour la dénoncer, l’objectivité du langage des lois des règles, des normes et des fiches dans un processus de simulation qui n’était pas sans contrainte – contraintes fonctionnelles de fidélité aux programmes et contraintes personnelles d’exercice dans des conditions de travail volontairement choisies comme dures – j’ai brouillé mes cartes/fiches et introduit par le jeu la diversité des langages du  » je « .

   Par des tableaux non programmés, fondés sur un canevas simple de trois éléments livrés à la fantaisie de ma manipulation, de témoin que j’étais jusqu’ici, je suis devenu acteur et je laisse désormais ma propre voix parler sur le versant du plaisir.

   Le travail est fondé sur la reconstruction d’un exercice de manipulation (investigation corporelle avant d’être plastique, investigation fondée sur la pratique et le plaisir découvert de l’exercice manuel au cours des années passées à la lente exécution de tableaux qui demandait une habilité des mains que je ne possédais pas) ; l’exercice de manipulation envisagé est du type de celui que peut pratiquer un prestidigitateur effectuant un tour de cartes, j’ai pour cette pratique recensé deux types de gestes (manipulation) : la manipulation linéaire, d’une part, la manipulation circulaire, d’autre part, ces appellations me sont propres ils rendent compte de ma préoccupation d’extraire de l’expérimentation, par sa définition même, un début de représentation plastique. La représentation métaphorique, dans un ensemble plastique, de l’expérimentation manuelle, vue le plus souvent comme réussie, ne doit pas négliger une phase importante de l’aventure du geste, celle ou le geste se cherche, s’égare et abouti à l’échec. Ceci constitue le troisième type de manipulations recensées, la manipulation ratée.

   Ce qui, dans l’exercice pictural, représente les cartes évoquées plus haut, ou tout autre objet de manipulation, est un système de grilles colorées fondées sur le partage par une diagonale plus ou moins large d’un rectangle ou d’un carré juxtaposés ou non à d’autres rectangles ou carrés. Quand la largeur de la diagonale est égale à la longueur de l’autre diagonale envisageable, la surface (carré ou rectangle) se trouve totalement occultée, c’est le cas de la première des trois grilles qui sert de fond. Sur ce fond, les deux autres grilles, ajourées elles par des ouvertures triangulaires, égales entre elles à l’intérieur d’une même grille, mais différentes d’une grille à l’autre se superposent.

   Pour ces nouveaux travaux, j’ai renoncé aux formes emblématiques des tableaux précédents, pour mon jeu (et un nouveau départ) la simplicité de la forme régulière de la géométrie euclidienne me suffisait, il ne me fallait en fait qu’un support pour ma retranscription.

L’une des caractéristiques essentielles de l’aspect formel des nouveaux travaux repose sur la modification d’essence de lecture des ensembles plastiques récents ; auparavant, de façon générale, la lecture se faisait de haut en bas et de gauche à droite, elle s’effectue maintenant dans le sens ou dans le sens inverse de la marche des aiguilles d’une montre.

   D’autres caractéristiques essentielles des nouveau travaux sont à souligner quant aux couleurs de la façon de poser celle-ci : ayant à entreprendre une série nouvelle de travaux qui était aussi une aventure nouvelle, je me retrouvai en situation de débutant devant la nécessité du choix, devenu acteur sur le versant du plaisir, il me fallait exclure la pratique réellement pénible et contraignante de la peinture au pistolet avec des matériaux industriels, ceux-ci avaient été choisis dès 1968 en raison de la neutralité dont, employés purs, ils témoignaient, étant ainsi en phase avec l’image du monde, de l’homme et du langage que je souhaitais donner, le sens de mon travail étant changé, je voulu que le moins de choses puisse freiner mon plaisir, je choisis donc la peinture acrylique dont l’emploi est des plus aisés. J’ai ainsi pu découvrir une très grande joie dans l’action physique de peindre, pour la première fois depuis dix ans je peignais sans masque ! (j’entends en même temps par là le masque à gaz et le masque qui dissimule le simulateur) ma joie était pareille à celle qu’éprouvent, j’imagine, les gens qui, étant sortis d’un pays totalitaire, peuvent parler sans crainte.

   Le choix du matériau étant fait, il me fallait choisir une marque et, dans le nuancier de celle-ci, des couleurs, me retrouvant, comme je l’ai dit plus haut, en situation de débutant, je me suis tenu leur raisonnement qu’au sein des sociétés fabricantes de peinture des spécialistes très avisés du marketing ne manquaient pas de proposer, dans l’échantillonnage des produits présentés à la vente, des boîtes de toute faites contenant cinq ou six tubes de couleur spécialement choisies pour le débutant et telles qu’elles soient suffisamment attractives, séduisantes et convaincantes pour que les candidats peintre soit, en raison au moins du résultat coloré obtenu, encouragé à persévérer. En toute logique, et en toute ironie, j’en conviens, je décidai de faire confiance aux  » marcheto-technico-commerciaux  » d’une société sise à New York qui propose aux vocations qui s’éveillent six couleurs porteuses de tous les espoirs

    Il me fallait aussi une façon de poser cette couleur, j’ai dit plus haut pourquoi j’avais choisi le pistolet et pourquoi j’y avais renoncé, il m’importait de trouver la façon la plus voluptueuse, mais aussi la plus efficace par rapport à mes objectifs ; après divers essais je décidai de poser la peinture à la brosse et de la retravailler avec des rouleaux de nylon très mouillés ensuite, de cette façon un très grand nombre de petites bulles se créent sur la surface peinte, lors du séchage ces bulle crèvent en laissant les traces de leurs contours en un simple relief. L’opération est répétée jusqu’à saturation du ton.

   La systématique des combinaisons de couleurs est celle des ensembles réalisés dans le cadre des six programmes antérieurs.

   L’aspect ludique de ces nouveaux travaux est ce qui y est essentiel, mon sentiment et qu’ils reflètent ma joie et mon plaisir à peindre, pour autant que qui se trouve en face d’eux veuille bien aller à la rencontre de cette joie et de ce plaisir, c’est dans le temps que s’établissent la complicité et la compréhension, avec les gens, comme avec les œuvres. Un effort est à faire pour pénétrer les règles d’un jeu qui n’est qu’accessoirement esthétique, et c’est en tant que, pour approcher une clé, un appel à l’intelligence doit être fait, et non à la culture, à l’histoire ou au bon goût, que ces tableaux sont subversifs dans la société qui est la nôtre. Ces travaux sont des anti images-inertes nées d’une pratique politique anti-contemplative du plaisir d’être et de faire.

Jean-Pierre Maury – 1978

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PREMIERS PROLEGOMENES A UNE DECLARATION SUR L’INTEGRALISME – 1989

La série de textes dont celui-ci est le premier se fonde sur une réflexion et une pratique entamée dès 1980, les premiers résultats en furent montrés dès 1981.

Un accident récent de l’aventure de l’expression de la conscience humaine a contribué à parceller l’approche des potentialités de l’homme qui, objet de connaissance légitimement démonté pour une étude nécessaire, c’est trouvé au terme de celle-ci inconsciemment contraint de ne plus exprimer de lui-même que telle ou telle spécificité exclusive que l’investigation catégorisant dominante avait répertoriée.

Ainsi le discours du poète fut séparé de celui du savant, ainsi l’expérience rejeta l’intuition, ainsi l’ordre devait régner…

L’intention normative débouchait sur la mutilation, tel pouvait se prévaloir de l’exercice de sa rigueur, tel autre de l’expression de ses émotions, l’hémiplégie allait être la punition infligée à la carence d’une volonté de connaissance qui oubliait que, si son moyen de s’exercer était de fragmenter ces objets, son but devait demeurer de les unir.

Le développement de théories scientifiques nouvelles quasi spéculatives, car non immédiatement vérifiable par l’expérience, qui ouvrent une perspective nouvelle et, autre exemple, la prise en considération de la notion de désordre dans des tentatives de systématisation de phénomènes, engagent à reconsidérer l’inéluctabilité réductrice d’anciennes approches, quand les certitudes de l’aléatoire se combinent aux doutes sur la nécessité.

De ce survol épistémologique succinct, il résulte que la complexité de maints objets de connaissance a été sous-estimée et que l’action seule de la pleine étendue de la diversité des potentialités humaines, réconciliées et unifiées enfin, pourra mener à bien le projet de la connaissance et, par là, la sauvegarde de l’avenir.

La prise en considération assumée et militante de la diversité des voix qui parlent en chacun, cette volonté de mise en œuvre de l’intégralité accessible de la ressource humaine contribuent, d’ores et déjà, à fonder et à féconder l’évolution attendue de la mouvance construite qu’elle concerne au premier chef.

Jean-Pierre Maury – 1989

Ce texte a été publiés dans  » MESURES art international « , n°3, avril 1989, Liège (B) et dans  » PRO « , n°9, mars 1993, Geldrop (NL).

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LA MOUVANCE CONSTRUITE – 1992

Essai de définition 

L’utilisation de l’expression « Mouvance Construite » a imposé à son créateur la nécessité de faire le point.

Pour ce faire, il paraît important de décrire les limites du sujet et, d’emblée, il peut apparaître comme un paradoxe de vouloir trouver une limite à ce que l’on a nommé une mouvance, c’est à dire une chose en mouvement, essentiellement fluctuante.

Il faut donc tenter d’expliquer en premier la signification de l’expression « mouvance construite » : c’est en fait une commodité de langage destinée à englober en une formule ramassée une diversité et un foisonnement d’aventures, successives ou contemporaines, relatives à une partie de l’histoire de l’art.

Cette partie de l’histoire de l’art est elle-même une partie de l’histoire de l’abstraction. Celle-ci est née au début du siècle, en même temps à Munich, avec Kandinsky, à Moscou, avec Larionov, a Paris, avec Delaunay, Picabia, Kupka …

L’abstraction en peinture, et en sculpture, a pris diverses voies, celles qui nous concernent ont porté des noms divers : « le suprématisme », « le néo-plasticisme », « le constructivisme », « l’abstraction froide », « l’art concret », « le minimal art » et même « l’art conceptuel », cette liste est, bien sûr, loin d’être exhaustive. Se sont trouvés concernés, dans cette perspective aussi, des mouvements variés tels que « Blok, en Pologne, « De Stijl », aux Pays-Bas, « Cercle et Carré », « Abstraction-Création » en France, etc …, la liste n’est pas complète non plus, tant s’en faut.

C’est cette variété d’aventures, unies par une familiarité à expliquer, qui constitue la mouvance construite ; ce à quoi elle se réfère couvre quasiment la totalité du 20ème siècle.

En effet, depuis quasiment le début de celui-ci existe une expression artistique plastique fondée sur une mise en œuvre de surfaces ou de volumes libérés de toute évocation et de toute suggestion d’image anecdotique, la forme régulée y a sa place dans la pureté et dans l’intensité, à ceci se joint l’économie des moyens et la simplicité des structures.

Ce qui précède est la très sommaire description matérielle des éléments d’une convergence envisagée le plus largement.

Cette convergence unit en une familiarité de fait des mouvements et des hommes que séparent et opposent même, parfois, les nuances affirmées de leurs singularités.

C’est pour ne privilégier aucune de ses singularités, et en fait pour affirmer la diversité et la richesse de ces constructeurs, de ceux qui composent et réfutent la pratique bavarde de l’art, qu’a été choisie l’expression « mouvance construite », elle témoigne et de l’appartenance d’individus singuliers et de l’activité elle-même, toujours patiemment développée et toujours en évolution, elle qualifie une pratique désormais indiscutablement historique, mais aussi indéniablement actuelle, d’une verdeur qui se montre toujours au fil de l’actualité.

N’avoir évoqué qu’au plan de sa matérialité convergente une aventure artistique ne fonde que fort peu celle-ci, si un constat d’accord peut s’établir sur ce à quoi ressemble les œuvres de la mouvance construite, un fondement plus fort est à exprimer au delà du seul formalisme.

Tracer des cercles et des carrés n’a, en soi, pas de sens ; ce n’est qu’intégré à une réflexion spirituelle que se crée un langage et que s’impose une nécessité. Détourné de la matérialité anecdotique pour se vouer au plus radical des réalismes, celui qui a choisi comme sujet la structure et l’analyse de celle-ci fait porter son effort sur des valeurs que le temps n’atteint pas.

C’est dans ce fait qu’il faut trouver la raison de la pérennité de l’art d’esprit construit, ainsi que dans la constatation, apparemment simpliste, que construire est toujours construire demain.

Au delà donc de la pesante matérialité, la mouvance construite s’ouvre donc vers l’infini de l’esprit et du cœur, tant dans la gratuité et la joie – qui sont les pendants de l’utile -, que dans la rigueur et la ferveur qu’implique le fait de s’adonner au langage le plus simple et le plus clair, celui où il se vérifie que la droite est le plus court chemin vers l’infini et la courbe le plus sûr moyen d’étreindre l’univers.

Pour ces raisons, sommairement exposées, la mouvance construite peut affronter la durée, en dépit des éphémères caprices de la mode, avatars de la loi du marché. Certes la mouvance construite dure en ce sens que les œuvres originelles qui l’ont fondée existent toujours, mais aussi elle dure en ce sens que jamais ne s’est tari le souffle des acteurs. Ceux-ci ont renouvelé, remodelé sans cesse le propos et, sans doute parce qu’il est le plus fondamental, le sujet s’est montré, par les œuvres qu’il générait, le plus vivant.

Cependant, la mouvance construite n’a pas été de façon permanente à l’avant-scène de l’activité artistique, il s’en faut de beaucoup, et, si sa pérennité paraît assurée pour les raisons évoquées plus haut, son importance circonstancielle a connu des hauts et des bas, alternance de faveur et de désintérêt, qu’il faudra évoquer avant d’en venir aux constatations qui permettent d’évoquer aujourd’hui un renouveau.

Les activités humaines s’inscrivent d’une façon générale dans un cadre économique, l’activité artistique ne dément pas cette assertion en tant que l’art s’inscrit dans un marché qui, pour se perpétuer, engendre des nouveaux flux de marchandises qui sont autant d’offres nouvelles pour créer des demandes nouvelles, c’est en se sens qu’il était dit plus haut que les caprices de la mode sont les avatars de la loi du marché.

Ceci est une composante, elle n’est pas exclusive, le mouvement même des idées, les replis et les abandons ont leur place dans cette réflexion. Il faut bien considérer que la mouvance construite a indéniablement forgé le langage plastique de la civilisation où nous vivons aujourd’hui, il faut voir le mobilier, le design, l’architecture, la typographie, la publicité, l’habillement … – c’est indéniable. Dans cette mesure, les retours à la figuration, ou à ce que Jo Delahaut nommait « des demi-mesures, peintures gestuelles, tachistes ou instinctives », tels qu’on les a connus vers 1926, en 1932, en 1960 et au début des années 80, même s’ils fournissent parfois d’estimables apports, n’apparaissent que comme le signe de temps de repli ou de fatigue, de renoncement ou de facilité, où la séduction parfois réelle ne peut, sur la distance, tenir lieu de conviction.

Etablir des concordances entre les dates évoquées ci-dessus et les événements de l’histoire ne serait pas sans enseignement, mais cet essai de définition veut se centrer sur l’état actuel et les perspectives de la mouvance construite.

Partout des individualités s’investissent profondément dans la poursuite d’une recherche dont résultent des œuvres passionnantes et variées, témoignant tant de la force injectée déjà par les illustres devanciers que du renouveau qu’un sang neuf amène.

Comme dresser un catalogue d’œuvres nouvelles, catalogue forcément arbitraire, limité et incomplet, ne suffirait pas, il faut mettre en avant la spécificité de nouvelles attitudes qui se développent ainsi que des événements révélateurs récents tels que la naissance de revues, revues consacrées à l’art d’esprit construit, et l’organisation de vastes rencontres pluridisciplinaires partout en Europe où plasticiens et scientifiques, sociologues et philosophes, proposent à la réflexion du public les perspectives et les attitudes qu’offrent, et impliquent, tant les nouvelles technologies que la nécessité de repenser les espaces urbains.

Enfin, c’est aussi, et surtout, de l’exercice de la liberté, s’opposant au chaos pour stimuler l’ordre à venir fondé sur la connaissance et la logique, ce en vue d’un approfondissement et d’un enrichissement spirituel de l’homme, que proviendra le meilleur de ce qu’apportera le nouvel élan acquis.

La mouvance construite, dans ce vaste cadre, paraîtra être au nombre de ces actuels laboratoires d’idées où se bâtit déjà l’humanisme internationaliste culturel par lequel l’homme du XXIème siècle échappera à la quotidienneté de l’inéluctable.

 

Jean-Pierre MAURY – 1992

 

Ce texte a été publié dans le catalogue de l’exposition « Aspects actuels de la mouvance construite internationale ». Initiée par les Amis des Musées de Verviers, cette exposition s’est tenue en 1993 à Verviers (B) et à La Louvière (B), puis en 1994 à Bruxelles (B) et Antwerpen (B). Une version raccourcie en fut publiée en 1997 dans le catalogue de l’exposition « Radical (1987/1997) Dix ans dans la « mouvance construite », au Moulins de Villancourt, Direction des affaires culturelles de la Ville d’Echirolles (F).

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« L’ATTITUDE COMME ART » – 1994

L’art étant parfois défini comme le moyen d’obtenir quelque résultat par l’effet d’aptitudes naturelles ou cultivées, il n’est pas indifférent de savoir qu’attitude et aptitude ont une étymologie commune.

L’attitude comme seule manifestation extérieure de ses dispositions et de ses intentions, c’est-à-dire comme comportement, ne me semble souvent que vaine si elle n’incarne pas, in fine, en œuvres achevées et maîtrisées, quoique bien sûr susceptibles d’être diversement appréciées.

Loin de moi de discuter la légitimité de la gratuité à ceux qui en ont le goût. Pour ce qui me concerne, l’extériorisation spectaculaire est pourtant hors de mise car, le temps passant, l’éventuelle faveur dont les caprices de la mode et du marché ont pu la faire bénéficier, datera inévitablement. Elle demeurera ainsi prisonnière d’un circonstanciel certes souvent habilement géré, mais peu transmissible dans notre monde d’anecdotes renouvelées, si ce n’est sur le registre de la nostalgie spéculative.

Soucieux de tenter de porter mon effort sur des valeurs que le temps n’atteint pas, l’attitude intérieure est pour moi tout autre chose. Toute activité artistique consciente se fonde sur l’ensemble des jugements et de tendances qui y incitent et qui constituent l’attitude mentale choisie pour le but que l’on se donne. Ainsi, défendant l’idée que la finalité de l’activité artistique est la connaissance, l’attitude y portant naturellement est pour moi de rigueur, d’exigence, voire d’ascèse.

Cette dernière ne se vit pour moi que dans l’atelier, ne nécessite vraiment pas qu’on en parle, mais participe à l’indispensable ancrage spirituel de la pratique sans lequel tracer des cercles et des carrés serait assez dépourvu de sens.

Jean-Pierre Maury – octobre 1994

Ce texte a été publié dans la revue Art & Culture, nov.94, 9ème saison, n°3, à Bruxelles (B), en 1994

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Au sujet de la mouvance construite (*) et de mon travail – 1995

Le travail que je poursuis depuis 1968 trouve sa place dans la mouvance construite. Depuis le début du siècle, cette mouvance s’affirme comme la seule aventure plastique résolument nouvelle qui soit historique déjà, mais qui est toujours actuelle.

Je voudrais ici expliquer ce point de vue et définir les limites de ce concept. D’emblée, il peut apparaître comme un paradoxe de vouloir trouver une limite à ce que l’on a nommé une mouvance, c’est-à-dire une chose en mouvement, essentiellement fluctuante.

Tentons donc d’expliquer la signification de l’expression mouvance construite : c’est en fait une commodité de langage destinée à englober en une formule ramassée une diversité et un foisonnement d’aventures successives ou contemporaines relatives à une partie de l’histoire de l’art, elle-même partie de l’histoire de l’abstraction, née au début du siècle, qui, en peinture et en sculpture, a pris diverses voies ; celles qui nous concernent pour la présente exposition ont porté des noms divers : le suprématisme, le néo-plasticisme, le constructivisme, labstraction froide, l’art concret, l’art minimal et même l’art conceptuel, cette liste est, bien sûr, loin d’être exhaustive.

C’est cette variété d’aventures, unies par une familiarité à expliquer, qui constitue la mouvance construite ; ce à quoi elle se réfère couvre quasiment la totalité du XXème siècle, en effet, depuis quasiment le début de celui-ci existe une expression artistique plastique fondée sur une mise en œuvre de surfaces ou de volumes libérés de toute évocation et de toute suggestion d « image anecdotique, la forme régulée y a sa place dans la pureté et dans l’intensité, à ceci se joint l’économie des moyens et la simplicité des structures.

C’est pour ne privilégier aucune de ses singularités, et en fait pour affirmer la diversité et la richesse de ces constructeurs, de ceux qui composent et réfutent la pratique bavarde de l’art, qu’a été choisie l’expression mouvance construite, elle témoigne et de l’appartenance d’individus singuliers et de l’activité elle-même, toujours patiemment développée et toujours en évolution, elle qualifie une pratique désormais indiscutablement historique, mais aussi indéniablement actuelle, d’une verdeur qui n’échappera pas aux observateurs impartiaux.

Tracer des cercles et des carrés n’a, en soi, pas de sens ; ce n’est qu’intégré à une réflexion spirituelle que se crée un langage et que s’impose une nécessité. Détourné de la matérialité anecdotique pour se vouer au plus radical des réalismes, celui qui a choisi comme sujet la structure et l’analyse de celle-ci fait porter son effort sur des valeurs que le temps n’atteint pas.

C’est dans ce fait qu’il faut trouver la raison de la pérennité de I’art d’esprit construit, ainsi que dans la constatation, apparemment simpliste, que construire est toujours construire demain.

Au-delà de la pesante matérialité, cette mouvance construite s’ouvre donc vers l’infini de l’esprit et du cœur, tant dans la gratuité et la joie – qui sont les pendants de l’utile –  que dans la rigueur et la ferveur qu’implique le fait de s’adonner au langage le plus simple et le plus clair pour moi, celui où il se vérifie que la droite est le plus court chemin vers l’infini et la courbe le plus sûr moyen d’étreindre l’univers.

La mouvance construite, dans ce vaste cadre, me paraît ainsi être au nombre de ces très actuels laboratoires d’idées où se bâtit déjà l’humanisme internationaliste culturel par lequel l’homme du XXIème siècle pourra peut-être espérer échapper à la quotidienneté de l’inéluctable.

C’est bien dans cette perspective que j’ai travaillé de 1968 à 1978 sur six vastes séries de travaux programmés consacrées au langage et s’inscrivant dans l’évolution de cette mouvance. Dans les travaux postérieurs à 1978 se joint à la rigueur, toujours présente, la volonté d’intégrer des composantes nouvelles dans l’exercice de la pratique construite, afin de contribuer tant à sa perpétuation qu’à son renouvellement attendu.

C’est ainsi qu’à la rigueur et aux exigences du travail théorique et pratique de la composition régulée que je mets en œuvre, j’ai ajouté une recherche de pure sensibilité intuitive sur les matières, les couleurs, tentant de cette façon de mettre en scène la plénitude de l’homme – l’aptitude à penser jointe à la capacité d’éprouver.

Ce qui est finalement donné à voir dans mon travail actuel, ce sont des tableaux où d’apparentes sinuosités sont composées à l’aide de seules lignes droites. C’est une démonstration de ce que la rigueur formelle engendre, à elle seule, un ordre de réalité complémentaire. Ce réalisme ajouté, quasi subversion d’un principe de composition minimal, apparemment fermé, n’est pas sans rapport avec l’humour, valeur ajoutée lui aussi, qui transgresse l’anodin ou le tragique pour le rendre supportable.

Dans le même temps, je suis devenu cofondateur et coéditeur de la revue MESURES art international, j’ai eu l’occasion de réaliser plusieurs intégrations à l’architecture, d’organiser des événements, de réaliser des conférences et de publier des textes théoriques tant en Belgique qu’à l’étranger.

Jean-Pierre Maury – 1995

(*) l’expression en français « mouvance construite » a été forgée par l’auteur vers 1984 et a été reprise ensuite en Belgique et en France, tant par de nombreux journalistes que par de nombreux dirigeants de galeries dans les titres qu’ils donnaient à leurs expositions.

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A propos du dessin – 1996

Le dessin a toujours eu une place prépondérante dans le travail que je poursuis depuis trente ans, tant dans l’élaboration des formes emblématiques distinctes des travaux programmés réalisés jusqu’en 1978, que  dans les développements renouvelés du seul thème que j’explore depuis : le croisement de deux diagonales dans un quadrilatère.

Si c’est ce thème seulement qui m’occupe désormais, cela aurait cependant pu être un autre, mais sans nul doute dans le cadre d’un projet qui lui serait resté le même : la transcription visuelle de la mise en scène d’un ou de plusieurs exemplaires de cet élément plastique minimal choisi et l’observation tant des mutations que des  relations nouvelles qu’engendrent des stimulations imaginatives dans une structure référentielle pré-choisie.

Jean-Pierre Maury – décembre 1996

Ce texte est paru dans « Zeichnen Konkret », Bulletin n°7, Galerie St. Johann, Saarbrücken (D) en 1996

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LA REVUE « MESURES ART INTERNATIONAL »

ET LA MOUVANCE CONSTRUITE – 2008

texte de l’exposé présenté le jeudi 6 mars 2008 par Jean-Pierre Maury devant la Classe des Beaux-Arts de l’Académie Royale de Belgique

Mesdames, Messieurs,

Je tiens en premier lieu à vous remercier de cette invitation qui m’honore et de l’intérêt dont vous témoignez ainsi pour l’aventure d’une revue et pour son objet particulier.

La revue dont question porte pour nom « MESURES art international », son objet était la « Mouvance construite ». Je me dois donc successivement de vous exposer l’historique de cette publication et de préciser ce qu’est cette « Mouvance construite ».

L’origine de cette publication remonte à plus de vingt ans, C’est en novembre 1987 que les Editions Heads end Legs, animées par Jean-Pierre Husquinet, publièrent un portfolio, tiré à 30 exemplaires, intitulé « Constructivistes Belges ». Ce portfolio contenait une œuvre de chacun des artistes suivants : Marcel-Louis Baugniet, Jo Delahaut, Jean-Pierre Husquinet, Jean-Pierre Maury, Victor Noël, Luc Peire et Léon Wuidar, il était préfacé par Fré Ilgen et fut présenté à la Galerie Excentric à Liège. C’est ainsi que fut créé un contact déterminant entre des artistes qui certes se connaissaient déjà, mais n’avaient pas songé auparavant à fédérer leurs efforts.

En effet, moins de deux mois plus tard, le 23 janvier 1988, six des protagonistes de « Constructivistes Belges », auxquels s’était joint Jean-Jacques Bauweraerts fondèrent la revue « MESURES art international ». A ce stade de l’exposé, il est indispensable de préciser que le termes « Mesures » n’a servi qu’à intituler une revue et que, jamais, les fondateurs de ladite revue ne se sont considérés comme les membres d’un groupe, « groupe » au sens où existèrent des groupes d’artistes aux pratiques délibérément convergentes, les nôtres demeuraient autonomes.

Mise donc en œuvre par un collectif de peintre, qui comprenait Marcel-Louis Baugniet, Jean-Jacques Bauweraerts, Jo Delahaut, Jean-Pierre Husquinet, Victor Noël, Léon Wuidar et moi-même, sans équipe rédactionnelle permanente, « MESURES » n’entendait pas être simplement une revue de plus sur le marché déjà étendu des publications relatives à l’art, mais voulait être une revue autre et singulière, vouée à rendre compte de la vivacité et de la verdeur de l’art d’esprit construit, se refusant à être le reflet du regard des commentateurs habituels de l’art, mais revendiquant d’être le champ d’action de praticiens convaincus que, désormais, il était capital de joindre à l’exercice de leur savoir-faire la pratique d’un faire-savoir indispensable et attendu.

Ainsi « MESURES » allait devenir le lieu de rencontre des constructeurs, des acteurs de la mouvance construite, et allait donc ouvrir ses pages à ceux qui, partout dans le monde, œuvraient animés par l’esprit de structure, qu’ils soient artistes, animateurs de lieux ou de publications, organisateurs d’événements, collectionneurs, etc. ..

Très vite, l’équipe singulière, représentative de toutes les générations ayant œuvré dans la mouvance construite, s’organisa, la collégialité serait la règle, et se partagea la tâche selon les disponibilités, les envies et les compétences de chacun.

Delahaut avait proposé comme titre « ARTNET », mais c’est le titre « MESURES », trouvé par Wuidar qui fut retenu, convaincu de l’utilité d’une ouverture marquée sur l’étranger, je suggérai d’y joindre « art international », Wuidar conçut la couverture ainsi que le logo de la publication et se chargerait de la mise en page, Husquinet allait superviser tous les problèmes techniques et assurer l’impression de la sérigraphie originale insérée dans chaque exemplaire, pour ma part je me chargeai de rédiger les éditoriaux et de mettre en forme l’agenda illustré qui allait annoncer gratuitement toutes les exposition relatives à l’art d’esprit construit.

Ainsi donc les caractéristiques techniques et matérielles de la revue furent-elles rapidement établies, elle se présenterait sous une farde rigide sérigraphiée, le format de celle-ci serait de 32 par 24 centimètres, elle comporterait 32 pages (40 à partir du n°3), elle serait illustrée en noir et blanc et tirée à 250 exemplaires numérotés. Outre cela il fut d’emblée décidé qu’une sérigraphie originale non signée serait insérée dans chaque exemplaire, les auteurs de ces sérigraphies furent, dans l’ordre : Sol Le Witt, César Domela, Jo Delahaut, Marcel-Louis Baugniet, François Morellet et Luc Peire ; une seconde sérigaphie originale, partagée et cosignée par les éditeurs fut insérée dans le tirage exceptionnel de 25 exemplaires supplémentaires du n°6 de la revue, ces exemplaires furent numérotés de I à XXV et constituent à ce jour l’ultime livraison de la revue, le tiré à part exceptionnel portant les signatures de J.-J Bauweraerts, J.-P. Husquinet, J.P. Maury, V. Noël et L. Wuidar.

Pour être complet quant à la description des différentes livraisons de la revue, il convient de préciser que des variantes de couleur distinguent les couvertures sérigraphiées de motif identique de deux en deux livraisons, pour les deux premières les couvertures sont de L. Wuidar, les troisième et quatrième sont de J.-P. Husquinet, enfin les deux dernières sont de J.-J Bauweraerts. Ajoutons mêmes que trois bulletins d’abonnement furent imprimés, les premières pages de ceux-ci furent respectivement créées par L. Wuidar, J.-P. Husquinet et J.-J Bauweraerts.

Le premier numéro de la revue allait sortir en juin 1988. Pour mener à bien ce projet, nous prîmes l’habitude de nous réunir chez Delahaut. Durant un peu plus de trois ans, les choix de publications comme les orientations de diffusion et les activités et actions labellisées « MESURES » furent décidées dans l’enthousiasme cimenté par tant par l’estime et l’amitié que par le sentiment de l’utilité et de la pertinence de l’aventure, ancrant ainsi l’aventure de « MESURES » dans la préoccupation de stimulation constante de la mouvance construite internationale qui allait être sa marque.

En effet, présentant des œuvres originales, des artistes, des textes inédits, des notices biographiques, un agenda illustré se voulant en quelque sorte les annales des manifestations de la mouvance construite, des informations sur l’actualité des manifestations et des publications dédiées, partout dans le monde, à l’art d’esprit construit, ouverte, dans la même perspective, aux problèmes de l’architecture et de l’urbanisme, s’offrant à être le lieu d’éventuelles polémiques, les animateurs de la revue « MESURES » pensaient bien contribuer au labeur incessant des constructeurs.

Comme il fut à l’époque décidé que la revue serait diffusée par abonnement, c’est-à-dire précisément par souscription à deux numéros, il a fallu pour en assurer une bonne diffusion, au delà des carnets d’adresses de chacun, se déplacer et être activement présent, en Belgique et à l’étranger, à l’occasion de foires, d’expositions internationales ou de colloques consacrés à l’art construit où des petits stands furent gracieusement mis à notre disposition dans notre quête de souscripteurs.

Ces voyages et les contacts qu’ils ont engendré ont contribués à la vérification de l’intuition à l’origine de l’aventure « MESURES » : en effet, il s’est bel et bien confirmé que l’art d’esprit construit était non seulement bien vivant, mais en plein renouveau et qu’il abordait des problématiques de nature fondamentale avec une totale liberté, affranchi d’un formalisme de surface dont d’aucuns avaient pu lui faire grief.

C’est ainsi que, générés par l’existence même de la revue, les contacts nombreux développés par ses animateurs les conduisaient à la réconfortante certitude que, partout, alors des individualités s’investissaient profondément dans la poursuite d’une recherche dont résultaient des œuvres passionnantes et variées, témoignant tant de la force injectée déjà par les illustres devanciers que du renouveau qu’un sang neuf amène.

A la fin de 1988 eut lieu, sur une proposition de Michel Clerbois, l’exposition « Identification III » à la Salle Allende à l’Université Libre de Bruxelles, à l’occasion de cette exposition de Jean-Jacques Beauweraerts et de moi-même, trois revues, consacrée à la mouvance construite et fondées par des plasticiens, étaient présentées au public, « Constructivist Forum,[1]

, « MESURES art international » et « PRO », cette présentation était accompagnée d’un accrochage d’œuvres des fondateurs des trois revues. L’année suivante, chez Robert Premsela à Amsterdam, les revues « MESURES » et « PRO », étaient présentée conjointement, là encore en même temps que quelques œuvres des fondateurs.

C’est de cette façon que se sont notablement développées les relations privilégiées qu’entretenaient déjà certains des fondateurs de « MESURES » avec la Fondation PRO, celle-ci, sous l’impulsion de son infatigable président Fré Ilgen [2]

, œuvrait dans le même sens que nous. Les contacts que nous avons eus nous ont fondés à élargir nos activités et à ainsi ponctuellement organiser des événements, sous le label de « MESURES », telle la partie belge de la tournée en Europe de Charles Biederman, initiative de la Fondation PRO ou la série des quatre expositions intitulées « Carte Blanche à Mesures », qui se sont tenues à la Galerie Cogeime à Bruxelles, grâce à la bienveillance agissante d’Ivan Lechien qui nous accorda sa confiance[3].

C’est de toutes ces activités, brièvement évoquées ci-dessus, activités de la revue en tant que telle et activités en marge de celle-ci, mais ayant eut lieu sous son nom, que les expositions « Aspects Actuels de la Mouvance Construite Internationale »[4]

 ont voulu témoigner en en réunissant tous les protagonistes en 1993 et 1994. Ces expositions, dont Fré Ilgen et moi-même assurèrent la coordination, furent une initiative des « Amis des Musées de Verviers ».

Enfin, en 2004, à l’invitation de Dominique Szymusiak, Conservatrice du musée départemental Matisse, une présentation de la revue eut lieu au Cateau-Cambrésis au Musée Matisse. Cette manifestation était un modeste contrepoint à l’exposition consacrée à la revue « Vouloir » qui, à Lille autour de 1925, fut, à l’initiative d’artistes aussi, le lieu d’émergence d’une modernité novatrice et radicale. La présentation de « MESURES » et de nombreux documents fut l’occasion d’un accrochage montrant les œuvres d’un certain nombre d’artistes impliqués dans l’aventure de la revue[5].

De 1988 à 1994, six numéros de la revue ont été publié, il ne fut jamais dit du sixième qu’il serait le dernier. Trois des sept protagonistes de l’aventure sont décédés. A ce jour, nul ne sait si « Mesures » renaîtra, ni sous quelle forme. Une revue « papier », des DVD, une présence sur le Web, des activités événementielles liées à son propos, tout est possible, rien n’est annoncé !

Sans préjuger donc de l’avenir, le passé de la revue peut être retrouvé, bien illustré, sur le site suivant : http://monsite.wanadoo.fr/mesures/

Il me faut maintenant préciser ce qu’est cette « Mouvance construite », largement évoquée dans les lignes qui précèdent.

C’est vers 1984 que j’ai forgé l’expression « Mouvance construite » celle-ci a été reprise ensuite, en Belgique et en France, tant par de nombreux journalistes que par de nombreux dirigeants de galerie dans les titres qu’ils donnaient à leurs expositions. L’avant-propos que j’avais rédigé pour le catalogue « Aspects Actuels de la Mouvance Construite Internationale » édité par les « Amis des Musées de Verviers » en 1993 contient une explication détaillée de ce concept que je reprendrai ici.

Pour ce faire, il parait important de décrire les limites du sujet et, d’emblée, il peut apparaître comme un paradoxe de vouloir trouver une limite à ce que l’on a nommé une mouvance, c’est à dire une chose en mouvement, essentiellement fluctuante.

Il faut donc tenter d’expliquer en premier la signification de l’expression « mouvance construite » : c’est en fait une commodité de langage destinée à englober en une formule ramassée une diversité et un foisonnement d’aventures, successives ou contemporaines, relatives à une partie de l’histoire de l’art.

Cette partie de l’histoire de l’art est elle-même une partie de l’histoire de l’abstraction. Celle-ci est née au début du siècle, en même temps à Munich, avec Kandinsky, à Moscou, avec Larionov, à Paris, avec Delaunay, Picabia, Kupka …

L’abstraction en peinture, et en sculpture, a pris diverses voies, celles qui concernaient les fondateurs de « MESURES » et bon nombre de leurs collègues ont porté des noms divers : « le suprématisme », « le néo-plasticisme », « le constructivisme », « l’abstraction froide », « l’art concret », « le minimal art » et même « l’art conceptuel », cette liste est, bien sûr, loin d’être exhaustive. Se sont trouvés concernés, dans cette perspective aussi, des mouvements variés tels que « Blok », en Pologne, « De Stijl », aux Pays-Bas, « Cercle et Carré », « Abstraction-Création » en France, etc …, la liste n’est pas complète non plus, tant s’en faut.

C’est cette variété d’aventures, unies par une familiarité à expliquer, qui constitue la mouvance construite ; ce à quoi elle se réfère couvre quasiment la totalité du 20ème siècle.

En effet, depuis quasiment le début de celui-ci existe une expression artistique plastique fondée sur une mise en œuvre de surfaces ou de volumes libérés de toute évocation et de toute suggestion d’image anecdotique, la forme régulée y a sa place dans la pureté et dans l’intensité, à ceci se joint l’économie des moyens et la simplicité des structures.

Ce qui précède est la très sommaire description matérielle des éléments d’une convergence envisagée le plus largement.

Cette convergence unit en une familiarité de fait des mouvements et des hommes que séparent et opposent même, parfois, les nuances affirmées de leurs singularités.

C’est pour ne privilégier aucune de ses singularités, et en fait pour affirmer la diversité et la richesse de ces constructeurs, de ceux qui composent et réfutent la pratique bavarde de l’art, qu’a été choisie l’expression « mouvance construite », elle témoigne et de l’appartenance d’individus singuliers et de l’activité elle-même, toujours patiemment développée et toujours en évolution, elle qualifie une pratique désormais indiscutablement historique, mais aussi indéniablement actuelle, d’une verdeur que montre la diversité des approches et des résultats constatés.

N’avoir évoqué qu’au plan de sa matérialité convergente une aventure artistique ne fonde que fort peu celle-ci, si un constat d’accord peut s’établir sur ce à quoi ressemble les œuvres de la mouvance construite, un fondement plus fort est à exprimer au delà du seul formalisme.

Tracer des cercles et des carrés n’a, en soi, pas de sens ; ce n’est qu’intégré à une réflexion spirituelle que se crée un langage et que s’impose une nécessité. Détourné de la matérialité anecdotique pour se vouer au plus radical des réalismes, celui qui a choisi comme sujet la structure et l’analyse de celle-ci fait porter son effort sur des valeurs que le temps n’atteint pas.

C’est dans ce fait qu’il faut trouver la raison de la pérennité de l’art d’esprit construit, ainsi que dans la constatation, apparemment simpliste, que construire est toujours construire demain.

Au delà donc de la pesante matérialité, la mouvance construite s’ouvre donc vers l’infini de l’esprit et du cœur, tant dans la gratuité et la joie – qui sont les pendants de l’utile -, que dans la rigueur et la ferveur qu’implique le fait de s’adonner au langage le plus simple et le plus clair, celui où il se vérifie que la droite est le plus court chemin vers l’infini et la courbe le plus sûr moyen d’étreindre l’univers.

Pour ces raisons, sommairement exposées, la mouvance construite peut affronter la durée, en dépit des éphémères caprices de la mode, avatars de la loi du marché. Certes la mouvance construite dure en ce sens que les œuvres originelles qui l’ont fondée existent toujours, mais aussi elle dure en ce sens que jamais ne s’est tari le souffle des acteurs. Ceux-ci ont renouvelé, remodelé sans cesse le propos et, sans doute parce qu’il est le plus fondamental, le sujet s’est montré, par les œuvres qu’il générait, le plus vivant.

Cependant, la mouvance construite n’a pas été de façon permanente à l’avant-scène de l’activité artistique, il s’en faut de beaucoup, et, si sa pérennité parait assurée pour les raisons évoquées plus haut, son importance circonstancielle a connu des hauts et des bas, alternance de faveur et de désintérêt, qu’il faudra évoquer avant d’en venir aux constatations qui permettent d’évoquer aujourd’hui un renouveau.

Les activités humaines s’inscrivent d’une façon générale dans un cadre économique, l’activité artistique ne dément pas cette assertion en tant que l’art s’inscrit dans un marché qui, pour se perpétuer, engendre des nouveaux flux de marchandises qui sont autant d’offres nouvelles pour créer des demandes nouvelles, c’est en se sens qu’il était dit plus haut que les caprices de la mode sont les avatars de la loi du marché.

Ceci est une composante, elle n’est pas exclusive, le mouvement même des idées, les replis et les abandons ont leur place dans cette réflexion. Il faut bien considérer que la mouvance construite a indéniablement forgé le langage plastique de la civilisation où nous vivons aujourd’hui, il faut voir le mobilier, le design, l’architecture, la typographie, la publicité, l’habillement … – c’est indéniable. Dans cette mesure, les retours à la figuration, ou à ce que Jo Delahaut nommait « des demi-mesures, peintures gestuelles, tachistes ou instinctives », tels qu’on les a connus vers 1926, en 1932, en 1960 et au début des années 80, même s’ils fournissent parfois d’estimables apports, n’apparaissent que comme le signe de temps de repli ou de fatigue, de renoncement ou de facilité, où la séduction parfois réelle ne peut, sur la distance, tenir lieu de conviction.

Etablir des concordances entre les dates évoquées ci-dessus et les événements de l’histoire ne serait pas sans enseignement, mais cet exposé veut se centrer sur l’état actuel et sur les perspectives de la mouvance construite.

Partout des individualités s’investissent profondément dans la poursuite d’une recherche dont résultent des œuvres passionnantes et variées, témoignant tant de la force injectée déjà par les illustres devanciers que du renouveau qu’un sang neuf amène.

Comme dresser un catalogue d’œuvres nouvelles, catalogue forcément arbitraire, limité et incomplet, ne suffirait pas, il faut mettre en avant la spécificité de nouvelles attitudes qui se développent ainsi que des événements révélateurs récents tels que la naissance de revues, revues consacrées à l’art d’esprit construit, de sites électroniques remarquables et l’organisation de vastes rencontres pluridisciplinaires, partout en Europe et dans le monde, où plasticiens et scientifiques, sociologues et philosophes, proposent à la réflexion du public les perspectives et les attitudes qu’offrent, et impliquent, tant les nouvelles technologies que la nécessité, par exemple, de repenser les espaces urbains.

Enfin, c’est aussi, et surtout, de l’exercice de la liberté, s’opposant au chaos pour stimuler l’ordre à venir fonder sur la connaissance et la logique, ce en vue d’un approfondissement et d’un enrichissement spirituel de l’homme, s’aidant de l’art pour éclairer le monde, que proviendra le meilleur de ce qu’apportera le nouvel élan acquis.

Je veux croire ici que la mouvance construite, dans ce vaste cadre, paraîtra être au nombre des utiles et potentiels acteurs de ces nécessaires laboratoires d’idées où se bâtit déjà l’humanisme internationaliste culturel par lequel l’homme du XXIème siècle échappera à la quotidienneté de l’inéluctable.

Ceci, en tous cas, me fonde à continuer à peindre …

Je vous remercie de votre attention.

 

Annexes

Contenus des différentes livraisons de « MESURES art international »

Contenu du n°1 (juin 1988) : (épuisé)

Editorial / Jo DELAHAUT, Pérennité de l’Art Construit / V. et F. MOLNAR, Mesure, géométrie, science de l’art / Walter LEBLANC, texte inédit / Albert RUBENS, trois projets de travail / Jürgen BLUM, « Null Dimension » / Manfred MOHR / Andreas BRANDT / Uwe KUWIAK / 3 aphorismes de François JACQMIN illustrés par Jo DELAHAUT / Agenda / Notices biographiques.

Ce numéro était rehaussé d’une sérigraphie originale de Sol LE WITT.

Contenu du n°2 (décembre 1988) : (épuisé)

Editorial / César DOMELA, Aperçus de l’art moderne / Aurelie NEMOURS, texte inédit / par Ben DURANT : Marcel-Louis BAUGNIET / Luc PEIRE, Le Groupe « MESURE » / Amédée CORTIER / Léon WUIDAR, FTZ, Darmstadt, RFA / Gunther WOLF / Francesco SOTO MESA / Gilbert DECOCK / Agenda / Notices biographiques.

Ce numéro était rehaussé d’une sérigraphie originale de César DOMELA.

Contenu du n°3 (juin 1989) :

Editorial / Dirk VERHAEGEN, texte inédit / Jean-Pierre MAURY, Premiers prolégomènes à une déclaration sur l’intégralisme / Hommage à MALEVITCH, accompagné d’un texte de Marcel-Louis BAUGNIET / Ben DURANT, La Belgique et l’Est de l’Europe – 1914-1928 / Ernest EDMONDS, Vers « Video Constructs » / Agenda / Notices biographiques.

Ce numéro était rehaussé d’une sérigraphie originale de Jo DELAHAUT.

Contenu du n°4 (avril 1990) :

Editorial / Nausica PASTRA, Les Analogiques : Méthode et Relation / Hartmut BÖHM, sélection de textes / Charles BEZIE, texte inédit / Ben DURANT, Bruxelles-Moscou (1914-1926) / Hommage à Henryk STAZEWSKI / Henri GABRIEL / Antonia LAMBELE / Agenda / Notices biographiques.

Ce numéro était rehaussé d’une sérigraphie originale de Marcel- Louis BAUGNIET.

Contenu du n°5 (mars 1991) :

Editorial / Fré ILGEN, Moscou ’90 / Yuri AVVAKUMOV, Architecture de papier / Jean-Pierre MAURY, Détente internationale – Une relecture de l’histoire / Waldo BALART, Le sens constructif de la créativité / Jean-Pierre HUSQUINET, Conception-Evolution / Nic JOOSEN, Plan et encadrement / Jaak Vuylsteke / François MORELLET, Sunset at sea / Carte blanche à « MESURES » / Agenda / Notices biographiques.

Ce numéro était rehaussé d’une sérigraphie originale de François MORELLET.

Contenu du n°6 (février 1994) :

Editorial / Hommage à Jo DELAHAUT / Jaak VUYLSTEKE, Relations / Bob VERSCHUEREN, texte inédit / Claude DORVAL, le mouvement MADI / Sigurd ROMPZA, Le langage pictural à l’épreuve / Michael KIDNER, texte inédit / Agenda / Notices biographiques.

Ce numéro était rehaussé d’une sérigraphie originale de Luc PEIRE.

Contenu du n°6 spécial (février 1994) :

Même contenu que le n°6, en plus est insérée une sérigraphie originale, partagée et cosignée par J.-J Bauweraerts, J.-P. Husquinet, J.P. Maury, V. Noël et L. Wuidar.

Notes

[1] La revue « Constructivist Forum – International Art Magazine , animée par Nathan Cohen et Tim Johnson a été publiée pour la première fois en 1985. Elle était destinée à offrir une plate-forme pour la diffusion des idées et des informations aux artistes travaillant au niveau international dans le champ systématique et construit.

[2] Fré ilgen, artiste hollandais, né en 1956 à Winterswijk (NL). Tout en poursuivant le développement de ses propres recherches de plasticien, Fré Ilgen fondateur et président de la Fondation Internationale PRO et éditeur de la revue du même nom, assisté de son épouse Jacqueline, organisa de très nombreuses rencontres, des conférences et des expositions dans le but de stimuler sans cesse le développement de la mouvance construite internationale. Son rôle irremplaçable d’animateur fut déterminant à la fin des années 80 et durant la première moitié des années 90 pour fédérer des liens féconds entre de très nombreux artistes et pour susciter des actions qui firent date.

[3] Ces expositions « Carte Blanche à Mesures » furent au nombre de quatre et eurent lieu à la Galerie Cogeime de  mars à juin 1990. La première de celle-ci était sous-titrée « 2 revues « MESURES a.i. » & « PRO » et leurs fondateurs », y étaient présentées des œuvres de M.-L. Baugniet, J.-J. Bauweraerts, J. Delahaut, J.-P. Husquinet, F. Ilgen, J.-P. Maury, V. Noël, L. Wuidar ; la deuxième présentait les travaux de F. Ilgen (NL) et de S. Rompza (D), et une sélection d’oeuvres de J.-J. Bauweraerts, J. Delahaut, J.-P. Husquinet, W. Leblanc, A. Rubens, D. Verhaegen ; la troisième présentait les travaux de H. Böhm (D) et de W. Leblanc et une sélection d’oeuvres de J.-J. Bauweraerts, G. Decock, J. Delahaut, F. Ilgen (NL) et de G. Vandenbranden ; la quatrième était, sous-titrée « Aspects de la Mouvance Construite Internationale », présentait des œuvres de W. Balart (E), M.-L. Baugniet, J.-J. Bauweraerts, C. Bézie (F), H. Böhm (D), N. Cohen (GB), G. Decock, J. Delahaut, J. Dubois, P. Horvath, J.-P. Husquinet, F. Ilgen (NL), T. Johnson (GB), M. Jouët (F), A. Lambelle, W. Leblanc, Y.H. Lee (K), J.-P. Maury, M. Meunier (L), V. Molnar (F), A Nemours (F), L. Peire, Y. Popet (F), H. Prosi (F), S. Rompza (D), A. Rubens, G. Vandenbranden, M. van der Made (NL), H. Van Sumere, D. Verhaegen, N. Vermeulen, J. Vuylsteke et L. Wuidar.

[4] Il y eut quatre expositions intitulées « Aspects Actuels de la Mouvance Construite Internationale », la première eut lieu en 1993 au Musée des Beaux-Arts de Verviers, tandis que la  deuxième, consacrée aux éditions et aux magazines fut présentée au Centre de la Gravure et de l’Image Imprimée à La Louvière, l’année suivante l’exposition fut accueillie au Centre Culturel Jacques Franck à Bruxelles, tandis que, un peu plus tard, sous le titre « Aspekten van de Hedendaagse Constructieve Beweging », les sections consacrées au peintres étaient montrées à Anvers au Koninklijk Museum voor Schone Kunsten van Antwerpen / ICC. Outre les artistes cités dans la note précédente, les artistes suivants prirent part à la section de l’exposition intitulée « Mesures a.i. et ses amis » : Y. Avvakumov (CEI), C. Biederman (USA), G.J. Blum-Kwiatkowski (PL), J. Carter (GB), A. Cortier, C. Domela (NL), J.-F. Dubreuil (F), E. Edmonds (GB), H. Gabriel, N. Joosen, M. Kidner (GB), S. Le Witt (USA), M. Mohr (D), N. Pastra (GR), H. Stazewski (PL), B. Verschueren. La section intitulée « PRO Verviers » présentait les artistes suivants : M. Bette (D), P. Halley (USA), F. Ilgen (NL), M. Kidner (GB), J.-P. Maury, F. Morellet (F), S. Rompza (D), P. Suter (CH). Enfin, la section « Editions-Magazines » présentait : « B4 Publishing » (GB), « Beau-House », « Editions Cyan », « Atelier-Editions Fanal » (CH), « Editions Heads & Legs », « Edition & Galerie Hoffmann » (D), « Galerie & Editions Lahumière » (F), « Galerie & Editions Quadri », « Fausta Squatriti Editore » (I), « a.s.b.l. Tandem », « Constructivist Forum » (GB), « I.C.S.A.C. », « MESURES art international » et « Fondation PRO » (NL).

[5] Pour illustrer la présentation de la revue « MESURES art international » au Musée Matisse, une sélection de huit oeuvres d’artistes ayant participé aux activités de la revue fut présentée. Il s’agit des oeuvres de : Jo Delahaut, John Carter, Frè Ilgen, Michael Kidner, Walter Leblanc, Jean-Pierre Maury, Vera Molnar et Sigurd Rompza.

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SURVOL D’UNE PRATIQUE  – 2013                    

Sur des formats carrés, rectangulaires ou circulaires.

A l’acrylique ou à l’encre, à main levée le plus souvent.

Considérant en seul motif le croisement basique de deux lignes diagonales dans un ou des quadrilatères jointifs.

Se lancer, décidé, et puis s’user à calculer et tracer.

Déformer sans peur, écraser sans crainte, quitter l’orthogonalité délibérément, inverser plans et plages, trancher dans ceux-ci, à vif même.

Pencher à droite, s’adosser pour la verticalité et pencher à gauche.

Epaissir et amincir aux convergences, ne parfois toucher à rien.

Faire onduler lignes et réseaux assouplis.

Galber et étirer.

Retourner et changer de sens.

Dérouter les niveaux. Découper, comme toujours depuis plus de quarante ans, quasi taille directe de la ou des couleurs, renouer avec le désordre et s’en remettre au hasard pour amonceler, modifier des éclairages et les figer en les juxtaposant en d’improbables rendus.

Subvertir les horizons.

Rester dansant.

Avoir l’humeur critique, la main audacieuse et l’ascèse joyeuse.

Chercher la lumière, vouloir élucider, oser, tout s’autoriser sans pour autant se permettre n’importe quoi. S’émanciper et s’affranchir en une lente patience acharnée.

Avec le même matériel … tenter encore et toujours l’au delà d’un visuel attendu et convenu pour ajouter des clés au trousseau du visible.

Jean-Pierre Maury – 2013

Ce texte, publié dans le catalogue « JEAN-PIERRE MAURY / collection mathy-gallot  » édité par le Musée de Cholet (F) en 2018, est la seconde version, revue et complétée, d’un document diffusé lors de l’exposition « Stabilités indécises » qui eu lieu en 2011, à la Galerie Quadri, à Bruxelles (B). Cette version revue a également été publiée dans le catalogue de l’exposition  » géométrie plurielle  » en 2014, à la Galerie Saint-Jacques, à Saint-Quentin (F).

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INTENTIONS D’ATELIER – 2020
« Le fond de la lettre »

Après avoir, peut être inconsidérément, choisi de renoncer à l’exercice d’une pratique qui m’a occupé pendant plus de cinquante ans, l’idée taraudante de m’y remettre s’est imposée insidieusement à moi

Mettre en œuvre ce nouveau développement est et sera impacté tant par la matérialité d’un état de santé que par la volonté d’ignorer celui-ci, par une stratégie discrète de contournement, réconfortante et motivante.

Pour ce faire, je suis revenu sur un projet ancien, intitulé « Résolution plastique de clauses contradictoires ». Je le reprends et entends l’amplifier aujourd’hui, les nouvelles technologies m’y aident.

Pourquoi reprendre un travail de 1972 ?

Ce type de travail, déjà intitulé à l’époque « Résolution plastique de clauses contradictoires », m’a occupé durant près de trois ans, ce parallèlement aux autres travaux que je poursuivais alors sur des ensembles programmés d’une toute autre nature.

Un nombre assez important d’œuvres de ce type fut réalisé sur des supports variés, elles sont dans des collections privées, l’une est même au Musée de Cholet… Le temps de deux saisons des œuvres de ce types furent présentées en expositions, en Belgique et à l’étranger, une œuvre monumentale, aujourd’hui détruite, fut réalisée pour une banque, en outre le travail fut documenté et analysé par un sémiologue réputé.

Alors qu’aujourd’hui, en 2020, je ne peux plus peindre en raison de problèmes de vue, je dois oublier les outils traditionnels du peintre, et donc en trouver ou en inventer d’autres.

Il m’est ainsi venu qu’en utilisant toutes les ressources d’un traitement de texte, je pouvais ressusciter une forme d’aisance pour développer des choses certes anciennes, mais insuffisamment explorées alors, avec précision et rapidité … Je vois cela comme un nouvel élan irrépressible.

Ce qu’est ce travail de « Résolution plastique de clauses contradictoires » ?

Ce travail est l’ensemble des réalisations diverses qui résultent de la mise en œuvre simultanée d’éléments d’écriture (textes) et de plasticité (fonds colorés), ces éléments étant liés par la nécessité qu’implique la pertinence de leur coexistence. 

Pour chaque tableau envisagé, deux phrases présentent deux énoncés distincts. Chacun de ces énoncés est en mode apparemment simplement déclaratif : en fait, chacun est conçu tel qu’ils s’avéreront faussement descriptifs dans toute autre situation qu’inscrits sur un support particulier.

Ce support particulier, le fond, est de la teinte résultant du mélange des deux couleurs évoquées dans les deux phrases. 

En résumé, ces deux phrases ne peuvent former un discours complet et valide que seulement en relation avec la couleur du fond.

Dans ces tableaux, les deux textes et la couleur du fond, qui y est associée, forment un signe unique, pertinent et, je dirais même, irréprochable.

Textualité et plasticité s’appuient donc mutuellement, deviennent en quelque sorte consubstantielles.

L’usage, sans contrainte, de couleurs de lettres, de polices de caractères variées ou de langues même, enrichira le travail, le laissant, en dépit du caprice ou d’un projet formulé, tout aussi irréprochable, au sens défini plus haut.

Pour le nom générique de ces travaux, je remplacerai le fort éventuellement rébarbatif « Résolution plastique de clauses contradictoires » par « Le fond de la lettre », illustrant ainsi, de façon lapidaire, le lien original entre texte et support.

Jean-Pierre Maury – 29 février 2020

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LEXIQUE DES ABREVIATIONS PROPRES A J.P. MAURY – 2010

  1. Appellations du titrage des travaux dans l’inventaire :

AAP                série «arts appliqués»

AFF                affiche

BIN                 reliure

CDV                carte de voeux

COL                collage

DES                dessin

EPR                ensemble / composition programmée

INT                 intégration à l’architecture

MDF                peinture sur MDF

MUL                multiple

MPM                Maury pas Maury (travail d’inspiration par un tiers)

OUI                 ouvrage illustré

PEI                  peinture

PPA                 peinture sur papier

REL                 relief

REM                « remasterisation » (travail ancien revisité)

RPC                résolution plastique de clauses

SCH                schéma de composition programmée

SCU                sculpture

SIN                 soft ink (encre sur support mouillé)

Le titrage des œuvres est le résultat d’une volonté, née en 2010, de lisibilité et d’unification des identifications des travaux. C’est à ce moment qu’à été créée la banque de données constituant l’inventaire évolutif du travail poursuivi depuis les années 60.

Les modalités d’attribution de titres aux divers travaux, développées depuis 2010, ont généré des appellations diverses nouvelles qui remplacent dans l’inventaire, sans les démentir pour autant, toutes les mentions anciennement portées sur les œuvres.

Chaque travail est généralement référencé par trois lettres et sept chiffres : exemple : XXX 0000000

les trois lettres indiquent la catégorie du travail considéré :

un ensemble programmé = EPR, un travail exécuté sur MDF = MDF, un dessin = DES …

les quatre premiers chiffres renseignent eux sur l’année d’exécution (parfois différente de celle de conception),

les trois derniers correspondent à partir de 2011 au numéro d’ordre dans l’année pour la catégorie considérée.

Pour les œuvres antérieures à cette date, ils correspondent à l’ordre d’entrée dans l’inventaire.

Ainsi, à titre d’exemple, l’intitulé « DES 2001006 » doit être compris comme l’appellation du sixième travail de type  « dessin » exécuté en 2001.

  1. Appellations pour la chronologie :

    EXG   exposition                   G pour groupe

    EXP   exposition personnelle      P pour personnelle

Chaque événement est généralement référencé par trois lettres et sept chiffres :

exemple : XXX 0000000           (selon le modèle exposé au 1.)

  1. Appellations pour la bibliographie :

ART                article de presse

CAT                catalogue

OUG               ouvrages généraux

PRE                préface d’exposition (non usité depuis 2020)

TXT                texte de JPM (sur son propre travail / sur d’autres)

Chaque ouvrage ou texte est généralement référencé par trois lettres et sept chiffres :

exemple : XXX 0000000           (selon le modèle exposé au 1.)